La nouvelle année commence sur les chapeaux de roues pour les éditeurs français, et par voie de conséquence pour les lecteurs aussi. Nous saluerons tout d'abord Delcourt et Urban, qui misent de plus en plus souvent sur des formats anthologiques, statutaires dans une bibliothèque et relativement intéressants pour le porte-monnaie. En outre, les deux éditeurs se partagent une grosse proportion de ce qui est sorti ce mois-ci. A leurs côtés, Ankama est le premier à s'intéresser aux séries de 215 Ink, Jungle et Réflexions commencent à approfondir leurs catalogues respectifs... Mais la vraie bonne nouvelle, c'est le retour tant attendu de Milton Caniff et de son boy-scout.
LE COMICS (indé) DU MOIS (de janvier)
INJECTION (tome 1, éditions Urban)
scénario : Warren ELLIS (Transmetropolitan, Planetary)
dessin : Declan SHALVEY (28 Days Later, Moon Knight)
genre : la ligue des méchants hommes extraordinaires
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Injection 1 à 5)
Véritable génie, Maria Kilbride faisait partie de l'Unité des Contaminations Culturelles Croisées, une unité de recherche para-gouvernementale chargée de prévoir et d'améliorer le futur. Ce think tank était également composé d'un agent secret, d'un logicien, d'une experte en informatique et d'un sorcier. La cellule a notamment inventé l'Injection, hybride entre machine et créature magique qui, depuis lors, menace l'humanité. Aujourd'hui, Maria est sortie de l'hôpital psychiatrique où elle était enfermée par ses anciens supérieurs, qui ont besoin d'elle pour les aider à gerer les conséquences de l'Injection.
Comme à son habitude, Warren Ellis multiplie les mystères d'entrée de jeu et délaisse la caractérisation des personnages au profit d'une intrigue dense et prenante. Les premiers épisodes interpellent, font la part belle à chacun des cinq anti-héros sans pour autant creuser leurs personnalités. Chacun d'eux est un archétype, depuis le clone de Sherlock Holmes jusqu'à l'agent secret style James Bond, mais cela n'enlève rien à leur charisme.
D'autant que l'auteur est de nouveau accompagné au dessin par Declan Shalvey, avec qui il avait relancé le personnage de Moon Knight pour Marvel Comics. Illustrateur au style non-conformiste, Shalvey a par moments un coup de crayon qui le rapproche de Kevin O'Neill, tandis qu'il se fait plus spectaculaire dans ses compositions à d'autres moments. Il manie aussi bien la staticité nécessaire à certaines scènes et le mouvement lorsque l'action se précise.
DANS LE RESTE DE L'ACTUALITE
INVINCIBLE (tome 20, éditions Delcourt)
scénario : Robert KIRKMAN (the Walking Dead, the Astounding Wolf-Man)
dessin : Ryan OTTLEY (Grizzly Shark, Haunt)
genre : super-héros qui se fait défoncer
édité chez SKYBOUND ENTERTAINMENT, un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Invincible 109 à 114)
Piégé dans une autre dimension par un Robot pris de mégalomanie, Invincible parvient à retourner sur sa propre Terre, où il dénonce son ancien coéquipier. Ce faisant, il déclenche une véritable guerre ouverte entre super-héros, et personne n'en sortira indemne. Par moments, Robert Kirkman pratique la politique de la terre brûlée pour assainir son casting gargantuesque. Il s'agit de l'un de ces moments, et la mise en oeuvre manque clairement de finesse. En contrepartie, Ryan Ottley semble se régaler à mettre en images ce jeu de massacre.
(3/5)
ENORMOUS (tome 1, éditions Ankama)
scénario : Tim DANIEL (Burning Fields, Curse)
dessin : Mehdi CHEGGOUR
genre : Roland Emmerich réinvente Godzilla
édité chez 215 INK aux USA (contient Enormous volume* 2 1 à 6)
Lorsque de gigantesques créatures surgissent dans les rues de Phoenix et provoquent un véritable carnage, Ellen Grace tente le tout pour le tout afin de sauver sa mère. Mais ce sont en réalité les Etats-Unis tout entiers qui sont attaqués, et l'armée semble impuissante. Plutôt que de reprendre là où il avait conclu son premier récit-catastrophe, Tim Daniel préfère repartir d'une feuille blanche. La série qui découle de ce choix est tournée exclusivement vers l'action, au détriment des personnages, ce qui est paradoxal du fait de la grande staticité du style photo-réaliste de Mehdi Cheggour.
(3/5)
TERRY et les PIRATES (tome 4, éditions BDArtist(e))
scénario et dessin : Milton CANIFF (Male Call, Steve Canyon)
genre : le cousin américain de Tintin
édité chez LIBRARY of AMERICAN COMICS, un label d'IDW PUBLISHING, aux USA (contient Terry and the Pirates 4)
Séparé de son ami Pat Ryan lors d'une attaque japonaise, Terry Lee se retrouve piégé en plein coeur du territoire occupé, où il retrouve néanmoins une vieille connaissance : Raven Sherman. Après bien des déboires, le jeune homme finit par rallier la zone libre, mais les dangers n'y sont pas moins grands. On a eu peur que BDArtist(e) abandonne la publication de l'oeuvre maîtresse de Milton Caniff, mais ce ne sera finalement qu'un hyatus. Sorti en réalité à la toute fin décembre, le quatrième tome des tribulations d'un Américain en Chine est encore un petit bijou, malgré le poids des années et de moeurs qui ont heureusement évolué depuis ces temps troublés.
(4/5)
THEY'RE NOT LIKE US (tome 1, éditions Jungle)
scénario : Eric STEPHENSON (New Men, Nowhere Men)
dessin : Simon GANE (Godzilla, the Vinyl Underground)
genre : super-héros en pleine crise d'ado
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient They're not Like Us 1 à 6)
Syd veut se suicider parce qu'elle n'en peut plus d'entendre toutes ces voix dans sa tête. Sa tentative est un échec, mais elle lui permet de recontrer la Voix, le charismatique leader d'un groupe d'adolescents pourvus de pouvoirs mentaux qui les mettent en marge du reste de l'humanité, ce qui leur sied fort bien. Eric Stephenson imagine ses propres X-Men sous le portrait peu flatteur d'adolescents surdoués qui en veulent au monde entier de les avoir rejetés. Le discours est réducteur et n'évite pas les clichés, mais la série se rattrappe grâce à une représentation graphique rafraîchissante.
(3/5)
JUDGE DREDD (tome 1, éditions Réflexions)
scénario : Duane SWIERCZYNSKI (the Black Hood, Birds of Prey)
dessin : Daniel NELSON (the Cape : 1969), Langdon FOSS (the Surface), Paul GULACY (Star Wars : Crimson Empire), Brendan McCARTHY (Revolver) et Inaki MIRANDA (the Chase)
genre : la loi, c'est lui
édité chez IDW PUBLISHING aux USA (contient Judge Dredd volume* 2 1 à 4)
Au vingt-deuxième siècle, Mega-City One abrite un milliard d'humains, et ce sont des robots qui assurent la maintenance de la mégalopole. Mais lorsque ces androïdes deviennent fous, il ne reste plus que les Juges pour remettre de l'ordre. Et parmi eux, Joseph Dredd est le meilleur. Duane Swierczynski relance la légendaire franchise britannique sous la bannière d'IDW Publishing, mais il n'en oublie pas pour autant le cynisme typicalement anglais de la version d'origine. Accompagné par de bons dessinateurs, au premier rang desquels Nelson Daniel, il délivre des histoires intenses et efficaces.
(3,5/5)
LOW (tome 3, éditions Urban)
scénario : Rick REMENDER (Fear Agent, Black Science)
dessin : Greg TOCCHINI (the Last Days of American Crime, Ion)
genre : post-apo la tête sous l'eau
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Low 11 à 15)
Les soeurs Caine sont revenues au Dôme de Solus, afin de se préparer pour un long voyage. Elles vont rejoindre leur mère, qui est parvenue jusqu'à la surface, où elle tente de retrouver la sonde qui s'est écrasée sur Terre. Mais il sera très périlleux de la récupérer. C'est finalement l'obscurité, une fois de plus, qui l'emporte dans le récit de Rick Remender, cette troisième arche narrative amorçant un virage vers le désespoir. Au dessin, on notera également la baisse de forme de Greg Tocchini, dont certaines cases semblent faites à la va-vite.
(3/5)
ASTRONAUTS in TROUBLE (éditions Delcourt)
scénario : Larry YOUNG (the Black Diamond, Planet of the Capes)
dessin : Charlie ADLARD (the Walking Dead) et Matthew DOW SMITH (Doctor Who)
genre : aventures foutraques sur la lune
édité chez AiT.PLANET LAR aux USA (contient Astronauts in Trouble : Space 1959 1 à 3, Astronauts in Trouble : Live from the Moon TPB*, Astronauts in Trouble : Cool Ed's OS* et Astronauts in Trouble : One Shot One Beer TPB*)
Ishmael Hayes a investi une bonne partie de l'argent qu'il a amassé dans un voyage vers la lune et il a invité une équipe de presse à le suivre dans son périple. Mais suite à un départ anticipé qui provoque un incident de parcours, les reporters découvrent la vérité sur les agissements du milliardaire. Delcourt a eu la riche idée de publier en un seul volume la maxi-série d'Image Comics, qui réimprimait les épisodes disparates édités à l'origine par AiT.Planet Lar. Si on y remarque déjà le métier de Charlie Adlard, qui reprend au pied levé la saga lorsque le tout aussi bon Matthew Smith la quitte, le fait que le scénario est un peu alambiqué et pas toujours très intéressant.
(3/5)
CROSSED : TERRES MAUDITES (tome 9, éditions Panini)
scénario : David LAPHAM (Murder Me Dead, Caligula)
dessin : Francisco MANNA (Giant-Size Grimm Fairy Tales)
genre : et ça continue en gore et encore
édité chez AVATAR PRESS aux USA (contient Crossed : Badlands 62 à 70)
Jennifer Land a été assassinée, et en enquêtant sur sa mort, son père découvre qu'elle était la victime d'un producteur de films X qui utilisait des actrices mineures. Il part à Los angeles pour se venger, alors que les marqués à la croix viennent de frapper la ville. Simple histoire de vengeance au départ, le récit de David Lapham tourne au grand spectacle à partir du deuxième tiers mais parvient à rester à peu près cohérent. Tout le contraire de la partie graphique, Francisco Manna se montrant efficace au départ mais manquant de régularité sur la fin.
(2,5/5)
DEADLY CLASS (tome 4, éditions Urban)
scénario : Rick REMENDER (Uncanny Avengers, Strange Girl)
dessin : Wes CRAIG (T.H.U.N.D.E.R. Agents, Guardians of the Galaxy)
genre : murder me dead
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Deadly Class 17 à 21)
C'est le dernier semestre à l'académie de Kings Dominion, et l'examen final est extrêmement simple : exterminer les rats, autrement dit les élèves qui n'appartiennent à aucune famille du crime. Marcus Lopez est justement de ceux-là, et il fait tout son possible pour survivre. Rick Remender multiplie les coups de théâtre retentissants et n'épargne absolument aucun de ses personnages. Malheureusement, il ne provoque en cela aucune réaction, le lecteur n'ayant pas eu le temps de s'attacher à eux. Beaucoup de bruit pour rien, donc, et le dessin de Wes Craig n'arrange rien.
(2,5/5)
PLANETARY (tome 2, éditions Urban)
scénario : Warren ELLIS (Transmetropolitan, Ocean)
dessin : John CASSADAY (Desperadoes) et Jerry ORDWAY (Adventures of Superman)
genre : si tu dois lire qu'un livre, c'est celui-là
édité chez WILDSTORM PUBLISHING aux USA (contient Planetary 13 à 27, Planetary Preview* et Planetary / J.L.A.)
Désormais, l'ennemi est connu : Elijah Snow organise la résistance face aux Quatre, tentant de recoller tous les morceaux du puzzle que constitue sa mémoire encore défaillante, et faisant appel à de vieilles connaissances, comme le détective Sherlock Holmes. Au-delà des histoires auto-contenues des débuts, qui étaient déjà fort intéressantes en elles-mêmes, Warren Ellis dévoile petit à petit un grand plan d'ensemble dont l'apothéose est un véritable mindfuck, admirablement dessiné qui plus est par un John Cassaday des grands jours. Et le crossover avec la J.L.A. permet pour sa part de retrouver le légendaire Jerry Ordway au dessin, ce qui ne gâche rien !
(4,5/5)
HELLSPAWN (intégrale, éditions Delcourt)
scénario : Brian Michael BENDIS (Powers) et Steve NILES (30 Days of Night)
dessin : Ben TEMPLESMITH (Wormwood) et Ashley WOOD (Popbot)
genre : surnaturel chiant
édité chez TODD McFARLANE PRODUCTIONS, un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Hellspawn 1 à 16)
Al Simmons livre bataille contre les influences du ciel et des ténèbres, notamment celle de Violator. Rejetant les principes des deux camps rivaux, le Hellspawn tente d'endiguer leur influence sur Terre, quitte à sacrifier quelques pions. Suite directe de la saga Spawn the Undead, cette nouvelle série de Brian Michael Bendis est tout aussi molle et peu accrocheuse. Qui plus est, le style torturé d'Ashley Wood commence à devenir franchement lassant. La suite, par Steve Niles et Ben Templesmith, est légèrement plus accrocheuse, surtout la saga de Hel.
(1,5/5)
MONSTRESS (tome 1, éditions Delcourt)
scénario : Marjorie LIU (Astonishing X-Men, Black Widow)
dessin : Sana TAKEDA (Drain, Soulfire : Shadow Magic)
genre : fantastique sauce soja
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Monstress 1 à 6)
Alors que le cessez-le-feu demeure fragile entre la Fédération Humaine et les créatures magiques appelées Arcaniques, l'ordre religieux des Cumaea est attaqué en son sein par une jeune femme aux grand pouvoirs : Maika Halfwolf est l'hôte d'une entité plus vieille que le temps. Si elle laisse encore le lecteur dans l'expectative lorsqu'elle s'achève, cette première arche narrative a le mérite de poser les bases d'un univers foisonnant, et il semblerait que Marjorie Liu ait encore beaucoup à dire sur le sujet. En outre, les planches de Sana Takeda sont pour la plupart des pièces d'orfèvrerie.
(4/5)
* OS : one-shot, récit auto-contenu
* PREVIEW : numéro spécial qui présente les premières pages d'une série, parfois dans un récit inédit
* TPB : trade paperback, recueil de fascicules ou d'épisodes numériques
* VOLUME : numéro d'identifiant d'une série
PAS LU, PAS PRIS (et pas près de le prendre)
BLOODSHOT REBORN tome 3, édité chez Valiant aux USA et chez Bliss en France
CHARLIE CHAN HOCK SHYE, une VIE DESSINEE (The ART of CHARLIE CHAN HOCK SHYE), édité chez Pantheon Books aux USA et chez Urban en France
les CODEURS de l'OMBRE (SECRET CODERS), édité chez First Second aux USA et chez 404 Editions en France
GONZO, édité chez Abrams ComicsArt aux USA et chez Nada en France
les HARLEM HELLFIGHTERS, édité chez Broadway Books aux USA et chez Pierre de Taillac en France
LUNA 1947 (Project Luna 1947), édité chez Markosia aux USA et chez Wetta en France
les SIMPSON tome 32 (Simpson Comics), édité chez Bongo aux USA et chez Jungle en France
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