lundi 29 février 2016

Doctor Who saison 5



diffusion initiale : du 2 septembre 1967 au 1er juin 1968
nb d'épisodes : 40 répartis en sept aventures, 17 épisodes manquants (détails ci-dessous)
épisodes complètement manquants :
  1. > Fury from the Deep 1 à 6
épisodes partiellement manquants :
  1. > The Abominable Snowmen 1, 3, 4, 5, 6
  2. > The Ice Warriors 2, 3
  3. > The Web of Fear 3
  4. > The Wheel in Space 1, 2, 4, 5
DVD :
  1. > coffret Lost in Time (comprend plein de petits bouts d'épisodes manquants, dont The Abominable Snowmen 2 et The Wheel in Space 3, 6, plus tout un tas de scènes retrouvées d'épisodes disparus, on air ou en footage, en bonus)
  2. > The Tomb of the Cybermen 1 à 4
  3. > The Ice Warriors 1 à 6 (les deux épisodes manquants sont reproduits sous forme de dessin animé)
  4. > The Enemy of the World 1 à 6
  5. > The Web of Fear 1 à 6 (le troisième épisode sous forme de télésnap)
Docteur : Patrick Troughton
Compagnons : Jamie McCrimmon, Victoria Waterfield, Zoe Heriot

WHAT'S UP, DOC ? Ici encore, un très grand nombre d'épisodes a disparu des archives de la BBC. Fury from the Deep n'existe carrément plus que sous forme de quelques extraits retrouvés ça et là, et quatre des six autres aventures de la saison sont incomplets. Seul The Tomb of the Cybermen, qui ouvre la saison, et The Enemy of the World, qui a été retrouvé dans son intégralité, disposent de l'intégralité de leurs épisodes.
Pour autant, on peut encore espérer, un jour, pouvoir regarder tous les Dr Who dans leur version classique. En effet, le 11 octobre 2013, la BBC a annoncé que l'on avait retrouvé de nombreux épisodes dans les archives d'un diffuseur du Nigéria, parmi lesquels l'intégralité de The Enemy of the World et quatre des six de The Web of Fear. Ce sont donc onze épisodes qui sont réapparus d'un coup, quarante-cinq ans après leur diffusion initiale ! Immédiatement publiés sur iTunes, ils ont fait l'objet de coffrets DVD, qui sont sortis respectivement le 25 novembre 2013 et le 24 février 2014 (l'épisode manquant de The Web of Fear devait être reproduit sous forme de dessin animé pour compléter l'histoire).
Ces épisodes ont été découverts par un certain Philip Moris, que nous ne remercierons jamais assez même si le tabac, c'est tabou. L'épisode manquant a été reproduit sous forme de télésnap plutôt que de dessin animé, et perso, je préfère. Aucun de ces deux DVD ne contient le moindre bonus, mais le fait même qu'ils existent suffit pour avoir envie de les acquérir.
Une fois encore, cette saison apporte de nombreuses nouveautés, qui pour la plupart vont passer à la postérité... mais pas forcément tout de suite ! Tout d'abord, il est fait état sur Wikipédia (info difficile à vérifier vu qu'il n'existe plus) que le premier épisode de Fury from the Deep voit la naissance du légendaire SONIC SCREWDRIVER ! De ce que j'en ai compris, il ressemble au départ à un simple stylo, et il ne réapparaîtra pas de tout le reste de la saison ! A l'époque, ce n'est donc encore qu'une idée en l'air, comme beaucoup d'autres.
Dans le genre, The Tomb of the Cybermen est pour sa part l'épisode qui marque la première apparition à l'écran des Cybermats, ces petites saloperies métalliques que les Cybermen utilisent pour pourrir la vie du Docteur. Non, ce n'est pas une idée à la con de Moffat, et si, pour l'instant, on ne les a vus que dans deux épisodes de la série récente, ils ont eu leur petit succès dans les années 60 et 70. Il faut dire que les Cybermen étaient surexploités durant l'ère Troughton. C'est déjà leur quatrième apparition en deux ans, ils font encore plus fort que les Daleks en leur temps !

Et pourtant, ce ne sont pas les seuls ennemis à fort potentiel de cette saison. Si les Daleks n'apparaissent pas de toute l'année (hormis une image d'archive dans le dernier épisode de The Wheel in Space), le Docteur et ses Compagnons vont devoir faire face à des entités cheloues (Fury from the Deep). Surtout, ils affronteront les Guerriers de Glace (The Ice Warriors), ces espèces de vikings-lézards technologiquement très avancés venus de la planète Mars et revus récemment dans l'épisode Cold War. Et, par deux fois, ils feront face aux Yétis (dans les aventures The Abominable Snowmen et The Web of Fear). Alors bon, dit comme ça, les Yétis c'est pas vraiment un adversaire majeur du Docteur, ou en tout cas pas un qui est resté dans les annales. Oui mais voilà, c'est leur maître qui a fait son grand retour il y a peu (sans eux, mais avec des bonshommes de neige). C'est en effet la Grande Intelligence qui est derrière le retour des abominables hommes des neiges.
A vrai dire, les Yétis ont une gueule de con. On dirait de grosses peluches, avec des yeux mais rien d'autre pour distinguer leurs visages. L'aventure The Web of Fear est en tout cas intéressante pour deux choses : c'est la première apparition à l'écran de Lethbridge-Stewart, encore simple colonel, mais j'y reviens un peu plus bas ; et surtout, c'est une aventure entièrement réalisée en studio, et qui pourtant bénéficie de décors absolument fabuleux, représentant le métro londonnien. Elle se permet même un épisode tout entier sans le Docteur, chose suffisamment rare pour être signalée. Malgré tout, son illogisme et sa lenteur la rendent finalement assez chiante.

Le dernier adversaire qu'affrontent Troughton et ses amis (dans The Enemy of the World) n'est autre... que Troughton lui-même ! A la manière de William Hartnell dans The Massacre of the St Bartholomew's Eve (S3E4), le deuxième Docteur a droit à un double rôle, avec cette fois-ci en deuxième plan le rôle du méchant, gominé à souhait et la mâchoire carrée et agressive. De manière globale, Patrick Troughton confirme les premières impressions de la saison précédente. L'acteur est très expressif, et son flegme transcende le rôle du Docteur.
Cette aventure est sans doute la plus réussie de la saison, et peut-être même de toute l'ère Troughton. C'est Barry Letts, futur producteur de la série, qui en signe la réalisation, et il se montre brillant en tant que metteur en scène. Cette histoire est pleine d'action, avec des effets spéciaux plutôt réussis pour l'époque, et un twist de milieu de parcours absolument renversant.
Aux côtés du Docteur, Jamie reste indéboulonnable. Lui et son éternel kilt (même lorsqu'il se balade dans l'espace ou dans le froid polaire !) sont complètement représentatifs de l'ère du second Docteur, et Frazer Hines, l'acteur qui joue Jamie, est indissociable de Patrick Throughton. Très à l'aise et jamais le dernier pour faire le con, le jeune homme, vingt-quatre ans à l'époque, est un excellent Compagnon.
Victoria quant à elle, quitte la série au terme de Fury from the Deep, préférant laisser la vie d'aventures derrière elle pour se poser un peu. Charmante mais un peu con-con, la Victorienne laisse place à ce que la série a peut-être produit de pire en la matière, l'horripilante Zoe Heriot, une jeune astrophysicienne de la Terre d'un futur proche. Une miss je-sais-tout à qui l'on aimerait mettre des claques, que Jamie ne se prive jamais de "tailler".

Au chapitre des curiosités de cette saison, il est tout d'abord à noter que la plupart des histoires se passent sur Terre. Seul The Tomb of the Cybermen se passe sur Tellos, la planète de naissance des bonshommes de fer blanc. Innes Lloyd, le producteur de la série, souhaite recentrer le Docteur sur des menaces à peu près envisageables (dans la diégèse de la série, s'entend), tandis que Peter Bryant, qui le remplace à compter de The Web of Fear, va petit à petit réorienter la saga vers la S-F. Une première tentative en ce sens sera faite dans The Wheel in Space, situé dans une station spatiale, certes en orbite autour de la Terre, mais laissant entrevoir cette orientation space-opera qui se dessine alors.
Autre curiosité, si l'on peut dire, la première apparition (dans The Web of Fear justement) d'Alistair Gordon Lethbridge-Stewart. De qui donc ? Celui que l'on nommera simplement le Brigadier et qui sera surtout associé à la troisième incarnation du Docteur (Jon Pertwee) n'est encore que colonel - en Angleterre, le brigadier équivaut à notre général de brigade à nous, un grade supérieur à colonel - et n'a pas encore fondé UNIT. Notons tout de même que Nicholas Courtney, qui joue le rôle, était déjà apparu dans la série, mais pour un autre personnage.

Au chapitre des bonii enfin, le coffret Lost in Time contient encore une fois des petits bouts de prises de vues de plein d'épisodes perdus, en plus des épisodes complets. N'oublions pas non plus le documentaire intitulé The Missing Years, qui explique pourquoi ces épisodes ont disparu et comment on peut en retrouver par moments.
Les DVDs standards quant à eux, contiennent de nombreux documentaires, souvent passionnants, pleins de témoignages des intervenants de l'époque et/ou des experts d'aujourd'hui. Celui de The Ice Warriors, sorti en aout 2013, contient quatre épisodes complets plus deux (les épisodes 2 et 3) sous forme de dessin animé. La qualité de ce dernier est particulièrement navrante, comparée aux précédents (The Reign of Terror (S1E8), The Tenth Planet (S4E2), etc.). Mal dessiné, mal animé, il ne vaut que parce qu'il fait le trait d'union entre les épisodes complets.
L'épisode que je vous conseille : The Ice Warriors. Même filmés en live, ces créatures sont d'un ridicule à pleurer. L'incroyable combinaison qui recouvre les acteurs est pourvue d'un tour de hanches qui ferait passer le cul Kim Kardashian pour une paire de noisettes, de gants en forme de pinces qui empêchent leurs porteurs d'attrapper quoi que ce soit, et de pieds palmés qui rendent leurs déplacements difficiles. Tu parles d'un streum ! Au delà de ça, il est amusant de constater comment les imaginaires de 1968 envisageaient le futur de la Terre, en matière de climat comme de robotique.

vendredi 26 février 2016

Todd McFarlane, le George Lucas du comics

Pour le deuxième volet de mon tour d'honneur des comics indépendants (ou en tout cas hors des majors) qui n'ont jamais franchi les frontières françaises, je vais aujourd'hui m'intéresser à un autre membre fondateur d'Image Comics, après Rob Liefeld la dernière fois. Et je vais pas chercher bien loin, puisque c'est du côté de Todd McFarlane que je me tourne. Mais promis, après je change de crèmerie.
L'INSTANT VO (What else ?)
C'est en 1984 que Todd McFarlane, originaire du Canada, fait ses premiers pas dans le milieu américain du comic-book. Mais c'est trois ans plus tard qu'il se fait connaître du grand public, avec un court passage sur Batman suivi d'un long run sur Hulk. En 1988, il rejoint David Michelinie sur Amazing Spider-Man, qu'il va pas mal bousculer, graphiquement parlant. Au point que son éditeur lui offre une nouvelle série Spider-Man rien qu'à lui, sur laquelle il ne restera pas plus d'une quinzaine de numéros.
Mais cela suffit pour faire de lui à la fois une superstar, et une diva. Suite à un différend avec son nouvel éditeur, McFarlane claque la porte. Il n'est pas le seul : ils sont sept artistes plus ou moins reconnus à l'époque à faire de même, et la suite, on la connaît tous. Ils fonderont Image Comics, chacun y disposant de son propre studio. Celui de McFarlane, en toute mégalomanie, s'appelle Todd McFarlane Productions, abrégé en T.M.P. pour les intimes.
Le fer de lance de T.M.P., c'est Spawn. Le personnage, soi-disant inventé par l'auteur à l'âge de seize ans, est une sorte de version occulte de Spider-Man qui se serait récupéré la bonne humeur contagieuse du Batman de la période Miller. Ajoutez un soupçon de monstres bien tortueux et une ou deux bombasses en colère, et vous obtenez tout simplement la série d'Image qui a duré le plus longtemps à ce jour. On en est à plus de deux-cent cinquante numéros, et le compteur reste ouvert !
Alors je rassure la famille, Todd McFarlane n'a pas réalisé les 250 épisodes, hein. Et heureusement d'ailleurs, parce que le style très caricatural de l'auteur n'aurait sans doute pas tenu sur le long terme. Pur produit des années 90, il n'aurait sans doute pas supporté les outrages du temps. Le dessin est donc repris d'abord par Greg Capullo, avec un tréma quelque part mais je sais plus trop où. Le graphisme se fait alors plus "réaliste", dans une certaine mesure, mais toujours aussi puissant.

Capullo et McFarlane alternent pendant un temps, avant l'arrivée de Tony Daniel. Ce dernier prend alors la place du patron à la planche à dessin, son style étant lui aussi assez caricatural. Mais ça ne marche qu'un temps, et c'est finalement Capullo qui plait le plus, et qui dure donc le plus longtemps. En gros jusqu'à la centième, où Angel Medina prendra les commandes. Là pour le coup, on est dans la pure veine de McFarlane, avec des proportions encore plus aberrantes.
Après cinquante épisodes à ce tarif, ce sont Lan Medina (aucun lien de famille avec le précédent, pour ce que j'en sais) et Brian Haberlin qui se relaient à la planche à dessin. Ce coup-ci, on braque à fond dans l'autre sens, avec un style le plus réaliste possible. Et en dépit d'un certain turn-over un peu avant la deux-centième, on restera sur cette dynamique avec l'arrivée de Szymon Kudranski.

Mais attention, Spawn, ce ne sont pas que des dessins, sans quoi la série n'aurait sans doute pas tenu aussi longtemps. Depuis ses débuts, elle a vu passer quelques scénaristes parmi les plus côtés. Rendez-vous compte que dès les premiers numéros, elle peut compter sur des synopsis d'Alan Moore, de Neil Gaiman et de Frank Miller, rien de moins ! Et quelques temps plus tard, on peut noter la participation de Grant Morrison et le retour de Moore.
Mais finalement, c'est McFarlane - en dehors d'un long run de Brian Holguin et d'un autre, moindre, de David Hine - qui s'occupera le plus souvent des scenarii. Et c'est bien lui le meilleur pour parler de sa création, en témoigne son retour remarqué il y a quelques années. Holguin quittait justement son poste, et McFarlane est revenu aux manettes, d'abord sous un nom de plume. Il a été plébiscité par les fans, et il a ensuite repris son nom pour les épisodes d'après.

Plus de deux-cent cinquante numéros, donc, et McFarlane n'en a même pas fait des caisses. Il aurait pu produire des trouzaines de numéros zéro, annuals, preview ou que sais-je pour profiter de la bonne forme de sa saga, mais en dehors de l'épisode spécial Resurrection et de quelques Bibles expliquant les tenants et les aboutissants de la saga, il n'a rien fait de tout ça.

Par contre, de nombreuses séries dérivées ont vu le jour. Curse of the Spawn s'intéresse aux personnages secondaires de la franchise, Spawn : the Dark Ages imagine une version médiévale du personnage, Spawn the Undead puis Hellspawn se penchent sur le rôle de l'anti-héros vis-à-vis du Ciel et de l'Enfer...  Tout ça, le lecteur français a pu le découvrir, d'abord chez SEMIC et maintenant chez Delcourt. Ils sont finalement assez rares, les projets du studio à ne pas avoir vu le jour par chez nous.

Parmi eux, on trouve une mini-série signée Mike Grell, l'auteur de Jon Sable, entre autres. Dans Spawn the Impaler, il imagine que Vlad Tepes était un hellspawn ! Signalons également une petite série de fascicules promotionnels, Spawn : Fan Edition, qui causent d'un hellspawn viking, ainsi qu'un épisode spécial d'Angela, une ange ennemie puis amante de Spawn, qui rencontre ici un hellspawn pirate.
 
Mais clairement, ce n'est pas le meilleur de ce qu'a produit T.M.P. Cette même Angela par exemple, a eu droit à une mini-série signée Neil Gaiman et Greg Capullo, autrement mieux foutue que l'épisode spécial dont je parlais au dessus. Quant à Violator, l'un des pires ennemis de Spawn, c'est le grand Alan Moore qui l'a mis en scène, dans une mini-série puis dans un crossover avec Badrock, dont je vous ai déjà parlé. Ce même Alan Moore est également à l'oeuvre sur le crossover entre Spawn et les WildC.A.T.S. de Jim Lee, une équipe que je présenterai lorsque je causerai de l'artiste.

Et puis tiens, en parlant de crossovers : Angela a plusieurs fois croisé la route de Glory, le personnage de Rob Liefeld, mais elle a aussi fait la rencontre d'Aria, un personnage du studio Avalon, durant une superbe mini-série mise en images par Jay Anacleto. Citons encore le crossover entre les versions médiévales de Spawn et de Witchblade, scénarisé par Garth Ennis, ou encore les deux rencontres entre Spawn et Batman, la première par McFarlane et Frank Miller, la seconde par Chuck Dixon, Alan Grant, Doug Moench et Klaus Janson.

Ca fait un sacré paquet de grands noms pour un si petit studio. Mais tout n'a pas toujours été tout rose pour autant, et McFarlane a notamment dû faire face à plusieurs déboires juridiques. Un joueur de hockey a par exemple porté plainte car un vilain de la série portait son nom ! Mais ce n'est pas le plus grave. En 1997, McFarlane se porte acquéreur des licences d'Eclipse Comics, un éditeur défunt. Avec ce catalogue, il va produire un numéro spécial baptisé Total Eclipse, mais il va surtout exploiter un personnage d'Eclipse : Miracleman.
Or, il se trouve que Miracleman appartient à Neil Gaiman, ce qui va entraîner une énorme embrouille entre les deux hommes. McFarlane exploite Miracleman sans demander son avis à Gaiman, Gaiman refuse qu'Angela, qui lui appartient aussi, apparaisse désormais dans la série... Après plusieurs années de procès, Miracleman s'en va chez Marvel avec son créateur... et Angela aussi ! Heureusement que McFarlane peut compter sur d'autres personnages secondaires, comme le gorille Cy-Gor ou les inspecteurs de police Sam & Twitch, parce qu'amputer son univers de la sorte aurait pu lui coûter cher.


Ce qu'il faut comprendre, c'est que Spawn et son microcosme sont les poules aux oeufs d'or de l'auteur, qui multiplie les produits dérivés à leur effigie. C'est la ligne de jouets, qu'il met en place très tôt via une deuxième entreprise appelée McFarlane Toys, qui lui rapportera le plus, mais on trouve aussi un dessin animé baptisé Adventures of Spawn, plusieurs jeux vidéo - ainsi qu'une participation du personnage à Soulcalibur 2, par exemple - et, summum de la mégalomanie, un film live ! Et bien entendu, chacune de ces incarnations a ensuite eu l'honneur d'un comics.


Parallèlement, Todd McFarlane développe aussi toute une gamme de produits dérivés de licences ou de personnages réels. Il y aura ainsi une maxi-série sur le Crow de James o'Barr, une série régulière sur le groupe de rock KISS ou encore un épisode spécial sur Ozzy Osbourne. Ce n'est pas la première, ni la dernière, fois que ces trois-là font l'objet d'histoires sur papier.
T.M.P. a également produit des séries originales qui ne sont liées ni à Spawn, ni à des stars. Elles sont relativement peu nombreuses, mais elles valent toutes le coup. Il y a d'abord eu Creech, la création de Greg Capullo, qui fit l'objet de deux mini-séries plus ou moins sympas, puis Haunt, une licence co-créée par Robert Kirkman, l'auteur de Walking Dead entre autres choses. Dernièrement, et celle-là est encore inédite en France, la mini-série Savior est un petit bijou illustré par Clayton Crain qui vient juste de se terminer outre-Atlantique.

Bilan des courses, le studio T.M.P., c'est avant tout Spawn et sa mythologie, mais ce sont aussi quelques produits de deuxième ordre qui valent la peine d'être lus. Une très grosse partie de la production américaine a été adaptée en français, mais il reste encore quelques pépites qui n'ont pas franchi l'océan.
Notez que je n'ai pas lu (car pas trouvé) quelques comics du studio :
- the Art of Todd McFarlane, un artbook qui doit valoir son pesant de cacahuettes
- Ozzy Osbourne, et là je ne sais pas trop à quoi m'attendre
- deux épisodes des comics tirés des jouets, le reste étant de toute façon très mauvais


Le bilan : 
A lire de toute urgence
Angela (décembre 1994, 3 épisodes)
Paru en VF dans le Planète Comics n°2 chez SEMIC, en juin 1997
scénario : Neil GAIMAN
dessin : Greg CAPULLO
Les Anges requièrent la présence d'Al Simmons au procès d'Angela. Un procès qui sent la trahison à plein nez, aussi les deux ennemis intimes vont-ils devoir s'allier pour espérer survivre, aussi bien face aux manigances du Paradis que face aux menaces de l'Enfer. Neil Gaiman et Greg Capullo accouchent d'un superbe spin-off de la série régulière qui développe tout un pan de son univers. Hélas, les brouilles entre le légendaire scénariste et Todd McFarlane priveront la série de ce personnage majeur.

Aria / Angela (février 2000, 2 épisodes)
Paru en VF dans le magazine Aria de mars 2001 chez SEMIC
scénario : Brian HOLGUIN
dessin : Jay ANACLETO
L'Ange guerrière Angela a été capturée par l'esprit du cauchemar qui se fait appeler Dr. Peter Traum. Exhibée comme un animal de foire, elle ne devra son salut qu'à l'intervention de la fée Aria Kildare, incapable de supporter une telle injustice. Ce crossover signé Brian Holguin se montre habile et intelligent, en ce sens qu'il évite le combat bête et méchant entre les principaux protagonistes. En outre, il met en avant l'incomparable talent de Jay Anacleto dont les peintures illuminent l'ensemble.

The Creech : Out for Blood (juillet 2001, 3 épisodes)
Paru en VF en un recueil chez SEMIC, en février 2002
scénario et dessin : Greg CAPULLO
L'Agence, dirigée par un groupe d'extraterrestres invincibles, constitue une menace que seul le Creech peut annihiler. Chris Rafferty, contacté par des agents du futur, doit entrer en résistance et tout faire pour aider le monstre à vaincre ses créateurs. Greg Capullo propose à travers le second volume de sa saga une version extraterrestre de Terminator. Voila qui est assez original et plaisant, en comparaison de la première mini-série qui se montrait un peu terne. Surtout, l'artiste garde tout son talent. Hélas, il faut avoir lu le premier, médiocre, pour comprendre le second.

Savior (avril 2015, 8 épisodes)
scénario : Brian HOLGUIN et Todd McFARLANE
dessin : Clayton CRAIN
Suite au spectaculaire crash d'un avion de ligne, la petite ville de Damascus est devenue l'objet de toutes les attentions. En particulier lorsque la presse et la D.A.R.P.A. ont découvert l'existence d'un étrange faiseur de miracles, amnésique. La nouvelle série de Brian Holguin et Todd McFarlane débute sur un rythme particulièrement lent, mais elle impose une ambiance bien à elle et soulève tant de mystères que l'on ne peut qu'avoir envie de la suivre. A cela s'ajoutent les illustrations fabuleuses de Clayton Crain.

Spawn : Architects of Fear (février 2011)
Paru en VF au format graphic novel chez Delcourt, en novembre 2011
scénario : Arthur C. CLARE et Todd McFARLANE
dessin : Aleksi BRICLOT
Al Simmons est attiré dans un piège par l'ange architecte Ethan. Le Hellspawn va devoir sauver son frère d'un bâtiment capable de piéger les âmes des humains avant leur mort, afin qu'aucun camp n'en profite dans la guerre millénaire qui oppose le Ciel et l'Enfer. Deuxième projet franco-américain après Spawn : Simony, cette nouvelle aventure est bien plus agréable, notamment de par son scénario moins ethnocentré et plus spectaculaire. Aleksi Briclot est pour sa part fidèle à lui-même : splendide !
Spawn : Godslayer (septembre 2006)
Paru en VF dans les Chroniques de Spawn H.S. chez Delcourt, en aout 2007
scénario : Brian HOLGUIN
dessin : Jay ANACLETO, Brian HABERLIN et Lan MEDINA
Il y a fort longtemps, Bairn était prince d'Endra-La. Après son naufrage, il revient sous la forme d'un Hellspawn, prêt à abattre un à un les Elyars, les divinités en qui il croyait dans son autre vie. Sa première cible est Llyra, la déesse dont son ancienne fiancée est la prêtresse. Superbement réalisé par Jay Anacleto, ce one-shot est le prologue d'une nouvelle série tournant autour de la mythologie. Brian Holguin a eu la bonne idée d'inventer son propre panthéon, avec lequel il peut jouer à sa guise.

Spawn : Resurrection (mars 2015)
scénario : Paul JENKINS
dessin : Jonboy MEYERS
Al Simmons, reclus au fond des limbes, reçoit la visite de Dieu : il est temps pour lui de revenir sur Terre, car non seulement Jim Downing n'est plus, mais l'Enfer a fait une nouvelle victime. Wanda, l'ancienne épouse du Hellspawn, a été assassinée... Le moins que l'on puisse dire, c'est que la nouvelle équipe part sur des bases bouleversantes. Paul Jenkins dévoile quelques révélations choc, tandis que Jonboy Meyers régale le lecteur de ses dessins tout en puissance, au style à mi-chemin entre le comics et le manga.


A feuilleter à l'occasion
Angela Special (juin 1995)
scénario : Beau SMITH
dessin : Brad GORBY
Durant une période de répit, Angela raconte à Al Simmons son combat particulièrement haletant face à l'un des Hellspawns qui l'ont précédé : Coupe-Gorge, un infâme capitaine pirate qui commandait un vaisseau maudit peuplé de démons cruels. Cet épisode spécial offert avec un numéro de la série Spawn est l'occasion pour Beau Smith de creuser un peu plus la mythologie de cet univers. Le coup de crayon de Brad Gorby n'est pas toujours régulier, mais il ne manque pas de puissance.

Case Files : Sam & Twitch (juin 2003, 25 épisodes)
Paru partiellement en VF chez Delcourt, dans les Chroniques de Spawn à partir de juillet 2005 puis en deux recueils, en novembre 2005 et en avril 2007
scénario : Mark ANDREYKO, Todd McFARLANE et Steve NILES
dessin : Paul LEE, Scott MORSE, Rodel NOORA, Greg SCOTT et E.J. SU
Il s'agit de la deuxième série dédiée au duo d'enquêteurs de l'univers de Spawn. L'une des quatre arches narratives n'a pas été traduite en français, mais ce n'est pas bien grave car c'est la seule qui soit mauvaise. Les trois autres poursuivent dans la même veine que la première série, c'est-à-dire un mélange de polar et de fantastique, au rythme relativement lent mais à l'atmosphère sensationnelle.

Daring Escapes (septembre 1998, 4 épisodes)
scénario : Andrew GROSSBERG et Tom ORZECHOWSKI
dessin : Jim FERN, Arthur NICHOLS et Alan WEISS
Travaillant pour le compte d'Overlap, Harry Houdini est missionné pour retrouver un artefact maléfique dont il est involontairement à l'origine de la création. Pour accomplir sa tâche, le maître de l'évasion se rend au Vatican, à la toute fin du quinzième siècle. Après une première apparition dans les pages de Spawn, le Harry Houdini réinventé par Tom Orzechovski et Andy Grossberg a droit à sa propre mini-série. Amusante, tumultueuse et dessinée correctement, quoique de manière un peu vieillotte, elle se laisse lire.

Glory / Angela : Angels in Hell (avril 1996)
scénario : Rob LIEFELD et Jim VALENTINO
dessin : Pat LEE et Andy PARK
Pour sauver l'âme de Celestine prisonnière de Malebolgia, sa consoeur Angela et la princesse amazone Glory vont traverser un à un les cercles de l'Enfer. Au bout de leur périple, elles feront une rencontre capitale, et feront face à une révélation fracassante. Surprenante conclusion de l'arche narrative Rage of Angels, ce crossover est étonamment bien écrit par Rob Liefeld et Jim Valentino, qui y dévoilent un coup de théâtre retentissant. Ajoutons que les deux artistes qui se partagent les planches font du bon travail.

Medieval Spawn / Witchblade (mai 1996, 3 épisodes)
Paru en VF dans le Planète Comics n°1 chez SEMIC, en avril 1997
scénario : Garth ENNIS
dessin : Brandon PETERSON, Billy TAN, Michael TURNER et Anthony WINN
Afin de sauver leur contrée menacée par une horde de créatures belliqueuses, le Hellspawn médiéval, Sir John de York, et la porteuse de la Witchblade Katarina s'allient face au roi-sorcier Lord Cardinale et à ses redoutables généraux. Un étonnant crossover typé heroic-fantasy qui développe les deux univers. Garth Ennis y est moins incisif qu'à son habitude, mais cela n'enlève en rien sa qualité à l'oeuvre. D'autant que le dessin est assez solide, malgré un trop grand nombre d'artistes.

Sam and Twitch (aout 1999, 26 épisodes)
Paru en VF en six recueils chez SEMIC, à compter de janvier 2001
scénario : Brian Michael BENDIS et Todd McFARLANE
dessin : collectif

L'inséparable duo d'enquêteurs cesse momentanément de s'intéresser à Spawn pour se concentrer sur des affaires généralement plus personnelles, mais tout aussi étranges. Aux manettes, Brian Michael Bendis impose un rythme lent et une narration assez lourde, mais l'intérêt ne s'émousse jamais. On trouve parmi les artistes invités à la fête Angel Medina, Alex Maleev ou encore Clayton Crain.

Spawn (mai 1992, 263 épisodes)
Paru partiellement en VF chez SEMIC puis chez Delcourt, depuis mai 1995
scénario et dessin : collectif

Lorsque les méchants meurent, ils vont en Enfer. Mais s'ils consentent à signer un pacte avec le diable, ils peuvent revenir sur Terre. Bien entendu, le contrat est biaisé, et l'élu devient en réalité un Hellspawn, un agent de l'Enfer sur Terre. Depuis ses débuts, la série au long cours de Todd McFarlane a connu bien des incarnations. Changement d'artistes, de scénaristes et même de personnage principal, elle a tenté de nombreuses choses, le plus souvent avec succès.

Spawn / Batman (1994)
Paru en VF dans le Spawn Hors Série n°1 chez SEMIC, en novembre 1997

scénario : Frank MILLER
dessin : Todd McFARLANE
Le Hellspawn Al Simmons et le chevalier sombre Batman, deux justiciers de la nuit aux méthodes musclées, affrontent le docteur Love, une scientifique folle à lier qui kidnappe et transforme des sans-abris en armes de destruction massive. Frank Miller et Todd McFarlane accouchent d'un crossover ténébreux entre deux héros charismatiques. Les années 90, qui ont vu naître ce que l'on appelle l'âge sombre du comics, trouvent dans cette alliance une exception qui confirme la règle.

Spawn : Blood Feud (juin 1995, 4 épisodes)
Paru en VF dans le Planète Comics n°4 chez SEMIC, en octobre 1997

scénario : Alan MOORE
dessin : Tony DANIEL
Les crimes d'un vampire, déguisé en inspecteur de police au-dessus de tout soupçon, sont imputés à Al Simmons. Cependant, loin de se ranger à l'avis de la presse, Sam Burke et Twitch Williams enquêtent de leur côté, et découvrent l'horrible vérité. Agréable en elle-même, cette mini-série n'apporte rien à la mythologie du personnage, si ce n'est un nouvel ennemi qui ne refera plus parler de lui de sitôt. On a connu Alan Moore bien plus innovant, et Tony Daniel ne semble pas encore donner la pleine mesure de ses capacités.

Spawn : Fan Edition (aout 1996, 3 épisodes)
scénario : Beau SMITH
dessin : Brad GORBY
Al Simmons est décidément un Hellspawn pas comme les autres, refusant de jouer le jeu de l'Enfer. Cela rend furieux son maître, Malébolgia, qui compte envoyer un puissant démon le tester afin d'en faire une machine de guerre, comme Nordik le Spawn viking en son temps. Offerts avec le magazine Overstreet's Fan, les trois petits fascicules qui composent cette mini-série signée Beau Smith ont de l'allure, majoritairement grâce aux dessins puissants et détaillés de Brad Gorby. Le scénario est quant à lui assez quelconque.

Spawn : Godslayer volume 2 (mai 2007, 8 épisodes)
Paru en VF dans les Chroniques de Spawn chez Delcourt, à partir de janvier 2008
scénario : Brian HOLGUIN
dessin : Philip TAN
Bairn, le Hellspawn tueur de divinités, poursuit son oeuvre en s'attaquant aux dieux d'Arcadie. Il sera aidé dans sa quête par sa bien-aimée Neva, puis par l'énigmatique Dromo, qui semble avoir un lourd passé commun avec les entités qu'il traque. Suite du superbe one-shot éponyme, cette mini-série, toujours signée Brian Holguin, reste plaisante. Pas tant pour le dessin de Philip Tan, sans commune mesure avec les oeuvres d'art de Jay Anacleto, que pour les quelques surprises qu'elle réserve.

Spawn : Simony (mars 2004)
Paru en VF au format graphic novel chez SEMIC, en juin 2003
scénario : Alex NIKOLAVITCH
dessin : Aleksi BRICLOT
Il semblerait que des Hellspawns aient été créés artificiellement à Paris. Que cela soit un fait avéré ou non, Al Simmons compte bien mener son enquête, attiré qu'il fût par la résonnance de son nécroplasme. C'est une bien sombre histoire que celle de ce Spawn à la française, due à un grand duo d'artistes. Alex Nikolavitch est un conteur intelligent, il est vrai bien accompagné par un Aleksi Briclot des grands jours. Malgré tout, le côté ethnocentré crée un certain décalage avec le reste de la franchise.

Total Eclipse (juillet 1998)
scénario et dessin : collectif

Total Eclipse est un épisode spécial qui présente à la fois des personnages issus de la série Curse of the Spawn, ainsi que quelques icones de l'éditeur défunt Eclipse Comics, dont la propriété intellectuelle a été tout juste récupérée par Todd McFarlane. On aurait pu s'attendre à ce que le créateur de Spawn fasse bon usage du catalogue qu'il récupéra à la mort d'Eclipse Comics. Au lieu de cela, il n'exploitera que partiellement le personnage de Miracle Man, et se contentera de produire cet unique numéro, scénarisé et dessiné pourtant par de grands noms.

Violator (mai 1994, 3 épisodes)
Paru en VF dans le Planète Comics n°3 chez SEMIC, en aout 1997
scénario : Alan MOORE
dessin : Greg CAPULLO et Bart SEARS
Violator est désormais piégé sur Terre et privé de ses pouvoirs. Vivant reclus, il devient qui plus est la cible de Tony Twistelli, qui lui envoie son meilleur homme de main, de plusieurs super-héros et même... de ses frères, qui voient en lui un maillon faible ! Summum de la participation d'Alan Moore à la mythologie de Spawn, cette mini-série qui marie avec bonheur un humour extrêmement acide et une violence inouie trouve dans le dessin de Bart Sears un étrange écho, son trait se positionnant à mi-chemin entre le cartoon et le malsain.

Violator Vs. Badrock (mai 1995, 4 épisodes)
scénario : Alan MOORE
dessin : Brian DENHAM
Badrock est engagé par l'institut Whiteside-Parsons pour capturer Violator, dont les scientifiques comptent se servir pour ouvrir un portail vers l'enfer. Mais l'ange Celestine est bien décidée à abattre le démon, quel que soit ce qui le protège. Suite directe de la mini-série Violator, ce crossover en quatre parties est également signé Alan Moore. Accompagné au dessin d'un Brian Denham solide, l'auteur mêle habilement les univers T.M.P. et Extreme, et fait preuve du même humour que précédemment.