samedi 8 juillet 2017

Sorties comics de juin

En ce mois de juin, les parutions indépendantes se font légèrement moins denses que précédemment, même si de nombreux éditeurs ont leur mot à dire. On saluera notamment l'initiative d'Alayone, qui publie Hellshock après une première expérience d'édition du très confidentiel The Secret of Crows, ou l'une des rares incursions de Futuropolis dans le domaine du comic-book. On s'intéressera aussi à Akiléos, qui développe son catalogue dans des directions variées. Mais de manière globale, ce sont toujours les quatre mastodontes qui se taillent la part du lion, et c'est Panini que l'on mettre à l'honneur ce mois-ci.

LE COMICS (indé) DU MOIS (de juin)
PROVIDENCE (tome 3, éditions Panini)

scénario : Alan MOORE (Watchmen, Tom Strong)
dessin : Jacen BURROWS (303, Neonomicron)
genre : fantastique qui chuchote dans les ténèbres
édité chez AVATAR PRESS aux USA (contient Providence 9 à 12)

Providence suit le parcours d'un journaliste new-yorkais du début du vingtième siècle, Robert Black. Lassé de ce que son patron lui propose, il décide de partir explorer la Nouvelle-Angleterre à la recherche des nombreuses légendes, sinistres ou étranges, qui l'entourent. Enfin arrivé dans la ville de Providence, Robert Black rencontre un certain Henry Annesley, membre de la Stella Sapiente, avant de se rendre au chevet d'Howard Lovecraft. Ce faisant, il découvre le véritable destin de l'auteur, dont l'intéressé lui-même ignore tout.
Il y a quelques années, Alan Moore et Avatar Press ont trouvé un partenariat relativement juteux pour les deux parties : cela faisait un grand nom à mettre au catalogue de l'éditeur, tandis que l'auteur, alors en manque de liquidités, pouvait se permettre quelques travaux alimentaires pour payer ses factures. En ont résulté plusieurs mini-séries, parmi lesquelles The Courtyard et Neonomicon, qui s'intéressaient toutes deux à la mythologie des Grands Anciens développée par H.P. Lovecraft. Avec Providence, Alan Moore va plus loin.
Basiquement, c'est un peu la Ligue des Gentlement Extraordinaires lovecraftienne : le génial anglais amalgame tous les récits du maître de l'horreur pour en faire un univers cohérent et en tirer une histoire conçue comme une enquête. Bien entendu, il faut une connaissance quasiment encyclopédique de Lovecraft pour saisir toutes les références, ce qui peut être un frein pour certains, ou qui peut en tout cas partiellement gâcher la lecture si l'on n'est pas suffisamment calé en la matière.
Car hormis cela, la maxi-série est assez statique et plutôt verbeuse, ce qui se traduit notamment par de très nombreuses scènes de dialogues, pas forcément cohérentes si l'on ne comprend pas à quoi elles se réfèrent. Pour appuyer encore un peu plus là où ça fait mal, c'est Jacen Burrows qui a été choisi pour dessiner les douze épisodes. Avatar n'a pas beaucoup de dessinateurs brillants, et Burrows est peut-être le moins pire du lot, mais son style est particulièrement rigide et ne plaira pas à tout le monde.
Malgré tout, la saga est réjouissante pour qui veut s'y investir. Et notamment ce troisième et dernier tiers, lors duquel Alan Moore révèle le grand plan d'ensemble, et parvient même à raccrocher, il est vrai un peu artificiellement, ce conglomérat de nouvelles lovecraftiennes à ses propres mini-séries parues précédemment chez le sulfureux éditeur. Il boucle ainsi élégamment la boucle. 



 


DANS LE RESTE DE L'ACTUALITE
La MALEDICTION de ROWANS (éditions Delcourt)

scénario : Mike CAREY (Lucifer, Suicide Risk)
dessin : Mike PERKINS (the Stand, Carnage)
genre : thriller qui te file un peu les poils
édité chez BOOM ! STUDIOS aux USA (contient Rowans Ruin 1 à 4)

Katie Shackley vient d'aménager à Rowans Rise dans le cadre d'un échange de maisons pour les vacances. Au départ ravie de sa nouvelle résidence, elle découvre petit à petit que la vieille demeure anglaise est le lieu d'une abominable malédiction. La mini-série de Mike Perkins joue avec les codes classiques du thriller horrifique et, en dépit de la staticité du médium, elle parvient à provoquer l'envie irrémédiable de tourner la page pour connaitre la suite. Les dessins de Mike Perkins sont agréables.
(3,5/5)

RUSSIAN OLIVE to RED KING (éditions Akiléos) 

scénario : Kathryn IMMONEN (Moving Pictures, Journey into Mystery)
dessin : Stuart IMMONEN (Nextwave, Shockrockets)
genre : drame aussi imbitable que son titre le laisse penser
édité chez ADHOUSE BOOKS aux USA (contient Russian Olive to Red King OS*)

Olive et Red filent le parfait amour, mais lorsque la première disparait lors du crash de son avion en plein coeur des montagnes enneigées, le second n'a plus que son chien pour lui remémorer celle qu'il a perdu. Pourra-t-il garder l'espoir qu'elle soit retrouvée ? Et si oui, combien de temps ? Pour leur nouveau projet commun, Kathryn et Stuart Immonen s'intéressent à la notion de perte d'un être cher. Le récit est assez plat en dépit des somptueuses et grandiloquentes illustrations de l'artiste, et se termine par un étrange texte cathartique sur le père disparu de l'auteur.
(3/5)

PLUTONA (éditions Futuropolis)

scénario et dessin : Jeff LEMIRE (the Underwater Welder) et Emi LENOX (Emitown)
genre : super-hero stalkers
édité chez STUDIO 171, Inc., un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Plutona 1 à 5)

La plus puissante des héroïnes de Metro City, Plutona, se fait plutôt discrète ces derniers temps. Et pour cause : comme vont le découvrir quatre camarades d'école, la justicière a été assassinée, et il leur revient de décider quoi faire de cette découverte. Jeff Lemire utilise quelques codes des histoires de super-héros traditionnelles pour étudier les effets d'une rencontre avec ce genre de personnages sur un groupe d'amis. Assez incohérente, la mini-série souffre qui plus est du style graphique un peu simpliste d'Emi Lenox.
(2/5)

NAILBITER (tome 3, éditions Glénat)

scénario : Joshua WILLIAMSON (Birthright, Ghosted)
dessin : Mike HENDERSON (Teenage Mutant Ninja Turtles) et Adam MARKIEWICZ (the Great Divide)
genre : slasher qui se sort les doigts du cul
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Nailbiter 11 à 15)

Nicholas Finch a capturé Edward Warren et compte lui faire avouer ce qu'il sait au sujet des tueurs en série de Buckaroo. Parallèlement, l'agent Barker est séquestrée par le Boucher, qui lui fait une démonstration saignante de ses talents. Joshua Williamson dévoile quelques pistes intéressantes et assène plusieurs coups de théâtre retentissants, qui font rebondir l'intrigue de manière inattendue. La série y gagne grandement en consistance, et le dessin de Mike Henderson est toujours aussi efficace.
(3,5/5)

DESCENDER (tome 3, éditions Urban)

scénario : Jeff LEMIRE (Sweet Tooth, Essex County)
dessin : Dustin NGUYEN (Wildcats 3.0, Superman Unchained)
genre : science-fiction laissée en pause
édité chez STUDIO 171, Inc., un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Descender 12 à 16)

Tim-21 doit désormais faire face à Tim-22, qui veut l'éliminer pour rester dans les bonnes grâces de Psius. Pendant ce temps, Telsa est trahie par le docteur Jin Quon, qui révèle sa véritable identité au leader de la révolution robotique. Andy parviendra-t-il à les retrouver à temps ? Jeff Lemire n'en finit plus de faire trainer son récit, utilisant chaque épisode de cette arche narrative pour retracer le passé des principaux protagonistes de sa saga. Cela commence à être sacrément long, mais heureusement, les peintures de Dustin Nguyen permettent de patienter.
(3/5)

OUTCAST (tome 4, éditions Delcourt)

scénario : Robert KIRKMAN (the Walking Dead, Invincible)
dessin : Paul AZACETA (Grounded, Potter's Field)
genre : fantastique qui va pas tarder à faire chier
édité chez SKYBOUND ENTERTAINMENT, un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Outcast 19 à 24)

Kyle a été capturé par Sidney, qui espère le convaincre, certes sous la contrainte, de coopérer avec lui. A sa recherche, le révérend Anderson finit lui aussi aux mains des possédés, et tous deux découvrent que leurs ennemis sont bien plus nombreux qu'ils le croyaient au départ. Comme à son habitude, Robert Kirkman fait monter le suspens et, sans trop y croire, on espère obtenir des réponses lors de la prochaine arche narrative. Ceci étant, l'association avec Paul Azaceta au dessin fonctionne toujours aussi bien.
(3,5/5)

STRANGERS in PARADISE (intégrale 1, éditions Delcourt)

scénario et dessin : Terry MOORE (Echo, Motor Girl)
genre : comédie slash drame slash thriller slash espionnage slash chef d'oeuvre
édité chez ABSTRACT STUDIOS aux USA (contient Strangers in Paradise 1 à 3 et Strangers in Paradise vol.2* 1 à 13)

La belle et naïve Francine Peters découvre que son fiancé Freddie Femurs, avec qui elle ne va pas tarder à se marier, la trompe avec sa secrétaire. Sa meilleure amie Katchoo décide de la venger de manière spectaculaire, même si la loi n'est pas forcément de son côté. Delcourt publie au format omnibus ce petit bijou d'humour et de dramaturgie, publié originellement chez Antarctic Press en 1993 puis en auto-édition. Comédie sentimentale aux personnages tellement réalistes et en même temps tellement passionnants, la saga de Terry Moore marque aussi pour son dessin sans défauts.
(4/5)

VELVET (tome 3, éditions Delcourt)

scénario : Ed BRUBAKER (Criminal, Fatale)
dessin : Steve EPTING (El Cazador, Crux)
genre : James Bond Girl qui met à l'amende ses pair(e)s
édité chez BASEMENT GANG, Inc., un label d'IMAGE COMICS, aux USA (contient Velvet 11 à 15)

Enquêtant sur la mystérieuse compagnie Titanic Holding qui pourrait être à l'origine de la mort de l'agent X14, Velvet Templeton demande l'aide de son ancien collègue Maximillion Dark, tout en sachant pertinemment que celui-ci en sait plus qu'il n'en dit sur le sujet. La maxi-série d'Ed Brubaker s'achève dans un bain de sang et en ne répondant qu'à demi-mots aux nombreuses questions qu'elle a soulevé tout du long. Là est sans doute la recette d'une bonne histoire d'espionnage, magnifiée en permanence par les illustrations de Steve Epting.
(4/5)

GIANT DAYS (tome 1, éditions Akiléos)

scénario : John ALLISON (Murder She Writes, Expecting to Fly)
dessin : Lissa TREIMAN
genre : comédie sentimentale adolescente donc gnan-gnan
édité chez BOOM ! BOX, un label de BOOM ! STUDIOS, aux USA (contient Giant Days 1 à 4)

Amies d'université, Susan Ptolemy, Daisy Wooton et Esther de Groot n'ont pourtant pas du tout le même tempérament. Mais elles s'entraident sans cesse, que ce soit lorsqu'elles tombent malades, quand Esther doit affronter le mysoginisme ambiant ou quand Daisy tombe amoureuse de la mauvaise personne. Si elle n'est pas désagréable en soi, la série de John Allison n'est qu'une suite de saynettes à vocation humoristique, plus ou moins décousues et, au final, pas vraiment amusantes. On ne s'attache pas aux héroïnes, et le dessin de Lissa Treiman est un peu trop passe-partout.
(2/5)

HELLSHOCK (éditions Alayone)

scénario : Jae LEE (Namor : the Sub-Mariner) et José VILLARRUBIA (the Mirror of Love)
genre : mystique qui a pas le gaz à tous les étages
édité chez IMAGE COMICS aux USA (contient Hellshock 1 à 4 et Hellshock vol.2* 1 à 3)

L'inspecteur Danek Haight croyait avoir tout vu, mais lorsqu'il est appelé d'urgence dans une petite église de New York et qu'il rencontre Daniel, sa foi bascule. Il y a vingt ans, Daniel est né de l'amour impossible entre Isabelle Lovelight et l'ange Jonakand, récemment revenu de l'enfer. Pour sa première mini-série en tant qu'auteur indépendant, Jae Lee joue la carte du héros torturé aux prises avec les pêchés du père. Le concept est dans l'air du temps et l'auteur ne fait montre d'aucune originalité, mais son style graphique est toujours aussi impressionnant. La deuxième mini-série est plus intrigante mais plus confuse.
(3/5)

* OS : one-shot, récit auto-contenu
* VOLUME : numéro d'identifiant d'une série

PAS LU, PAS PRIS (et pas près de le prendre)
ETERNAL WARRIOR (Wrath of the Eternal Warrior), édité chez Valiant Comics aux USA et chez Bliss en France
HIP HOP FAMILY TREE tome 2, édité chez Fantagraphics aux USA et chez Papa Guede en France
JACK le TEMERAIRE (Mighty Jack), édité chez MacMillan aux USA et chez Rue de Sèvres en France
NINJAK tome 3, édité chez Valiant Comics aux USA et chez Bliss en France
SILVER, édité chez Dark Planet aux USA et chez Glénat en France

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