samedi 26 août 2017

Full Bleed Studios : ça va saigner !

La rubrique comics V.O. d'aujourd'hui sera exceptionnellement courte, parce que nous allons parler d'un petit studio qui n'a produit au final qu'une seule et unique franchise, déclinée sur quelques séries et mini-séries. Elle sera aussi exceptionnellement plus froide, parce que le studio en question nous vient du Canada. En principe, j'essaie de me concentrer sur les éditeurs états-uniens uniquement, mais celui-ci est si intrinsèquement lié à ses voisins du sud que je ne pouvais décemment pas faire l'impasse.


L'INSTANT VO (What else ?)
L'éditeur en question se nomme Full Bleed Studios, et il a été créé par Dale Keown. Canadien d'origine, donc, Keown se fait tout d'abord connaitre chez Aircel Comics, une maison relativement importante dans les années 80 et chez qui il collabore aux séries Elflord ou Samurai notamment. Remarqué pour son style puissant, il est recruté chez Marvel Comics à la fin de la décennie, où on lui confie assez rapidement les rènes de la série dédiée à Hulk, avec Peter David au scénario.

Si elle a moins d'impact que les X-Men et dérivés, la saga du géant vert donne une certaine notoriété à Dale Keown, qui va dès lors vouloir voler de ses propres ailes. Occasion lui en est donnée chez Image Comics, refuge des dessinateurs en mal de reconnaissance au début des années 90. Il y invente un nouveau personnage, Pitt, qui après quelques featurings dans les séries Youngblood ou Cyberforce, obtient sa propre série à la fin de l'année 1992, sous le label Full Bleed Studios. C'est tout d'abord un Ashcan (sorte de version prototype en noir et blanc de l'épisode numéro un) qui voit le jour, suivi en début d'année suivante par un fascicule en couleurs.

L'histoire se concentre sur un cousin extraterrestre du Hulk qui aurait reçu les griffes et le pouvoir auto-guérisseur de Wolverine. Traqué par les siens, il trouve refuge sur Terre et s'y découvre un frère jumeau. S'y ajoutent une conspiration para-gouvernementale, des super-héros, une tueuse lycanthrope et, sur la fin, des voyages dans le temps et des entités toutes-puissantes. Sur à peine vingt numéros (sans compter le classique épisode 1/2), tout cela fait quelque peu bordélique : il manque clairement un auteur, même si Richard Pace vient prêter main forte à l'artiste au synopsis. Pour autant, deux dessinateurs ne font pas un scénariste...
Autre problème : les numéros sortent avec la régularité d'un coucou suisse... arrêté ! Deux en 1993, cinq l'année suivante, puis trois, puis quatre, encore trois en 1998 et le petit dernier en début d'année suivante : il faut être devin et/ou patient pour suivre la saga. Le hyatus de 1996 peut éventuellement s'expliquer par le fait qu'en cours de route, Dale Keown décide de se passer des services (de toute façon limités) d'Image Comics pour s'auto-éditer. Full Bleed Studios devient donc structure d'édition à part entière, et outre les deux épisodes normaux qui sortent cette année-là, on peut aussi compter un one-shot, In the Blood, qui s'insère au coeur de l'histoire en cours mais qui est conçu exclusivement par Richard Pace.
Et alors que la série classique touche à son terme, le nouvel homme à tout faire de Full Bleed délivre une nouvelle mini-série, Pitt Crew, qui s'intéresse aux personnages secondaires de la saga, nombreux, ou au passé encore inédit de l'anti-héros. Chacun des cinq numéros suit donc son propre cours, d'abord sous les crayons d'un remarquable Ken Lashley, puis sous ceux, plus brouillons, de Scott Lee, dont le style ne convient pas vraiment à l'univers. Finalement, c'est Richard Pace qui s'occupe des crayonnés sur l'ultime épisode.

Mais en définitive, ce que l'on retiendra surtout, ce sont les rares mais très bons crossovers auxquels le géant aura droit. De manière tout à fait prévisible, il va d'abord rencontrer Hulk, sous les auspices de Peter David. Le duo se reforme donc pour un crossover brutal et cousu de fil blanc, mais qui fonctionne à plein. Plus surprenant, d'autant qu'il intervient des années après l'arrêt de la série du colosse, le crossover avec le Darkness de Top Cow est moins primaire mais tout aussi agréable.
Hormis ce petit extra, qui signe le retour de Pitt dix ans après le vingtième opus de sa saga (mais qui avait été prévu des années auparavant, si l'on en croit le First Look - un Ashcan qui tait son nom - paru en 2006), le chant du cygne de Full Bleed Studios a lieu au tout début du vingt-et-unième siècle, sous la forme d'un sketchbook, d'un carnet de croquis si vous préférez, que signe Dale Keown en décembre 2001. Depuis, l'artiste a surtout travaillé chez Top Cow, sur le Darkness justement, mais aussi sur Berserker.

Concrètement, la série principale est à jeter, mais si vous avez l'occasion de lire les deux crossovers, cela vaut le détour. Donc pour une fois, rien d'inédit dans ce qui est bon ! En France, deux éditeurs se partagent le maigre gateau. C'est tout d'abord SEMIC qui a publié le crossover avec Hulk dans le magazine du géant vert, puis les deux tiers de la série et le one-shot dans quatre fascicules à dos carré. Ensuite, Delcourt a repris le crossover avec le Darkness dans le cinquième recueil consacré à ce dernier. Notez que je n'ai pas lu (car pas trouvé) quelques comics du studio :
- en l'occurence, le Pitt Sketchbook, qui n'est pourtant pas une édition limitée à ma connaissance

Le bilan : 
A lire de toute urgence
Hulk / Pitt (décembre 1996)
Paru en VF chez SEMIC dans le magazine Hulk numéro 35
scénario : Peter DAVID
dessin : Dale KEOWN
Une faille dimensionnelle entraîne le colossal hybride extraterrestre baptisé Pitt dans l'univers du colosse de jade, Hulk. Les deux titans vont entamer un terrible combat pour protéger leurs proches, avant d'en comprendre les tenants et les aboutissants. Bien entendu, il s'agit purement et simplement d'un crossover entre deux grosses brutes, primitif et jouissif. Dale Keown s'y montre parfaitement à son avantage, représentant parfaitement les deux personnages qui l'ont fait connaitre du grand public.

A feuilleter à l'occasion
The Darkness / Pitt (aout 2009, 3 épisodes)
Paru en VF chez Delcourt dans le cinquième recueil du Darkness
scénario : Paul JENKINS
dessin : Dale KEOWN
Sur la trace d'un homme infecté par un virus extraterrestre, le colosse Pitt et son jeune demi-frère Timmy font la rencontre de Jackie Estacado, nouveau parrain de la pègre new-yorkaise, qui ne peut s'empêcher de penser que le monstre est la créature qu'il traque. En auteur appliqué, et rarement décevant, Paul Jenkins délivre ici un crossover solide et plutôt cohérent, qui ne se borne pas à un combat primaire. Dale Keown, de son côté, semble à l'aise avec les principaux protagonistes, l'un des deux étant sa création.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire