vendredi 10 juin 2016

Broadway Video : la dernière séance

L'article sur les comics VO d'aujourd'hui sera nettement plus court que les précédents, et pour cause, puisqu'il vous parle d'un éditeur qui n'a pas duré longtemps. Un éditeur qui, une fois n'est pas coutûme, n'a aucun lien avec Image Comics mais avec... une boîte de production pour la télévision !


L'INSTANT VO (What else ?)
Fondée en 1979, Broadway Video produit de nombreux shows télévisés dont le fameux Saturday Night Live, créé en 1975 par Lorne Michaels. Elle tire son nom de l'adresse de ses bureaux, sur Broadway. Le Saturday Night Live va donner naissance à plusieurs "spin-off" au fil des ans, parmi lesquels les Late Night with..., différentes personnes s'étant succédé à sa présentation. Dans les années 90, Broadway Video se diversifie et commence à produire des films, sous le label Braodway Video Film.
La société continuera à multiplier ses marques durant cette décade, avec une société de sous-traitance pour la post-production de films et séries (Broadway Video Post-Production), une autre spécialisée dans l'acquisition de licences et le partenariat avec d'autres groupes (Broadway Video Ventures) et une autre dédiée à la distribution (Broadway Video Enterprises). C'est cette dernière qui va donner naissance, en 1995, à Broadway Comics, une ligne de comic-books dont les rênes sont confiées à Jim Shooter.

Shooter, c'est pas vraiment un débutant. Scénariste et occasionnellement artiste chez DC Comics durant les années 60, il part pour la maison d'en face après avoir arrêté ses études, à l'orée de la décennie suivante. Chez Marvel, il sera parfois crédité en tant qu'auteur, mais c'est surtout son rôle d'éditeur qui deviendra prépondérant. A la fin des années 70, il devient même éditeur en chef à la suite d'Archie Goodwin, et c'est sous son règne que les Uncanny X-Men de Chris Claremont ou les Avengers de Roger Stern connaîtront le succès.
Mais son interventionnisme le brouille avec bon nombre de créateurs, qui partent alors pour la Distinguée Concurrence. Shooter est viré en 1987, mais il rebondit assez vite et, à la fin des années 80, il monte la société Voyager Communications, qui édite des comics sous le label Valiant Comics. Il sera une fois de plus renvoyé par la direction trois ans plus tard, suite à quoi il crée Defiant Comics, un éditeur qui ne tiendra pas longtemps. Nous en reparlerons. Finalement, en 1995, l'association est faite avec Broadway.

Les deux premiers titres lancés par Broadway Comics sont des anthologies, lancées en novembre et décembre 1995. Dans la première, Powers that Be, le super-héros extraterrestre Cor partage l'affiche avec la bad girl justement nommée Fatale, mais l'association ne dure qu'un numéro ! Fatale est bifurquée sur l'autre magazine, et la série de Cor, Star Seed, prend l'intégralité du sommaire, au point que la revue sera rebaptisée à son nom après six numéros.


La deuxième anthologie s'appelle Shadow State, et elle fait donc apparaître pour la deuxième fois Fatale, aux côtés de la curieuse série 'Till Death Do Us Part. Encore une fois, Fatale ne restera pas longtemps (deux numéros cette fois-ci). L'autre moitié du magazine devient donc l'histoire centrale, et elle est amusante en ce sens qu'elle se divise en deux parties. 'Till Death Do Us Part, donc, qui conte les péripéties d'un petit bandit amateur de comics qui se retrouve transformé en super-héros...
... et Image Isn't Everything, qui se trouve être la BD que lit l'anti-héros, et qui moque ouvertement le style bêbête et le dessin disproportionné de certaines productions d'Image Comics, en particulier de ce que produit Rob Liefeld. D'ailleurs, le titre dit tout le mal que pense Jim Shooter de ces nouvelles stars au succès injustifié, selon lui. Et Fatale dans tout ça ? Et bien au final, elle a droit à sa propre mini-série en six épisodes, qui débute en janvier de l'année suivante.


Entre temps, Broadway Video Enterprises, la maison-mère, a commandé à Shooter un comics spécial destiné à ses meilleurs clients, pour les fêtes de fin d'année. Produit à peu d'exemplaires et ayant coûté fort cher à produire, Miracle on Bradway est logiquement le comics le plus rare de l'éditeur, même si Shooter a eu la riche idée de le proposer à la lecture sur son blog. L'histoire, un peu con-con, mêle dans un conte de Noël moderne l'intégralité des personnages de Broadway, déjà apparus dans les anthologies ou à venir !
En mai 1996, l'éditeur réalise un autre épisode spécial, Babes of Broadway, qui regroupe des illustrations des personnages féminins de la firme dans des poses plus ou moins lascives. Enfin, en juillet de cette même année débute la série Knights on Broadway, dont le pitch est assez original. Mais l'aventure est de courte durée et, avant que Shooter n'ait pu rapatrier les licences de Defiant , Broadway Comics est vendu à Golden Books, qui fait faillite peu après.


Voilà qui signe la fin de cette courte histoire, simple goutte d'eau d'à peine un an dans la longue carrière de Jim Shooter. En France, autant vous dire que l'éditeur est passé complètement sous le radar de tout le monde. Déjà que Valiant a à peine été survolé, alors imaginez ce que SEMIC pensait d'une telle étoile filante...
J'ai trouvé tout ce que Broadway Comics a produit. Vous me direz, c'était pas bien compliqué.
Le bilan :
A feuilleter à l'occasion
Fatale : Inherit the Earth (janvier 1996, 6 épisodes)
scénario : Janet JACKSON, Joe JAMES, Jim SHOOTER et Pauline WEISS
dessin : J.G. JONES
Traquée sans relâche par la Confrérie et sa branche dissidente d'Utah, Fatale a le pouvoir d'absorber les facultés et les connaissances de quiconque entre en contact avec elle. Cette capacité est d'autant plus efficace lorsqu'elle embrasse la personne. En plein milieu des années 90, il était évident que Jim Shooter succomberait, comme bon nombre de ses concurrents, à la mode de la Bad Girl. Celle qu'il présente dans cette mini-série bénéficie d'un scénario relativement accrocheur, et du dessin encore un peu hésitant mais déjà remarquable de J.G. Jones.

Knights on Braodway : I Remember the Future (juillet 1996, 3 épisodes)
scénario : Janet JACKSON, Joe JAMES, Jim SHOOTER et Pauline WEISS
dessin : Geof ISHERWOOD
Tamara Bryn Neil est née avec une intelligence hors norme et la faculté de voir le futur. Un avenir apocalyptique, qui la pousse dès son plus jeune âge à inventer l'ultime source d'énergie et les moyens de l'appliquer pour sauver le monde. Terrifiée, sa mère refuse de croire en ses divagations. Le quartet d'auteurs de Broadway Comics s'attache ici à mettre en place une histoire de science-fiction difficilement crédible mais finalement assez originale, et dessinée de manière très correcte par Geof Isherwood. Hélas, elle s'arrête brusquement suite à la cessation d'activité de l'éditeur.

Powers that Be / Star Seed (novembre 1995, 9 épisodes)
scénario : collectif
dessin : Geof ISHERWOOD, J.G. JONES, John ROSS et Andrew WENDEL
En tant que fils d'extraterrestre, Cor bénéficie des incroyables pouvoirs de son père. Mais s'il ne prend pas régulièrement un médicament spécifique, il peut mourir d'un simple rhume. Or, ses réserves s'épuisent, alors qu'un ennemi surpuissant se fait jour. Première série de Broadway Comics, Powers that Be devait être une anthologie. Et effectivement, le premier numéro présente deux séries, mais c'est rapidement Star Seed qui prend l'avantage et devient le titre majeur, au point que le comics sera rebaptisé dès le septième numéro. La série, sans révolutionner le genre, est assez agréable.

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